« Sans issue » est une installation qui traite du thème très sensible de l’émigration. Les deux plasticiens Hyacinthe Ouattara et Pierre Garel l’ont abordé sous deux angles différents. L’un rend hommage à Yaguine et Fodé, guinéens morts à 14 et 15 ans dans un train d’atterrissage d’un avion à destination de la Belgique, l’autre montre des femmes burkinabé qui attendent, et des hommes qui veulent partir.
L’installation commune est constituée de 42 peintures, organisée dans un espace contenant également des objets peints, un éclairage particulier, et une bande– son en boucle. Des pointes et du fil de fer sur le sol rendent la circulation difficile, àl’image du parcours du combattant qu’est la tentative de quitter le continent africain pour partir en occident. Un abécédaire explicatif accompagne l’exposition.
Le Centre Culturel Français de Ouagadougou a accueilli dans ses murs cette exposition pour sa première installation publique. Les artistes projettent de faire tourner cette exposition, en Afrique et en occident.
Hyacinthe Ouattara
fevrier – mai 2007
« chaque jour étant une vie, la couleur, la lumière étant un langage à part entière : la série de mes peintures immortalise la mémoire de Yaguine et Fodé qui ont connu une fin tragique. J’ai peint avec le cœur et non par technique, parce que j’ai été touché par leur destin. je me suis dit : voici un sujet qui me parle. Une façon pour moi d’être dans mon époque, car c’est cela aussi être artiste, parler du vécu d’autrui, être porte–parole des sans voix. Et avoir un regard critique, telle est la place de l’artiste dans une société. Ici, la toile de jute est le symbole de la faim, que ces deux jeunes guinéens connaissaient. des matériaux pauvres comme les vieux cartons collés, portes–monnaies abîmés sur des sacs qui contenaient, avant, des céréales. Toiles suspendues à l’image de l’avion dans l’air, suspendues comme ceux qui ont besoin de secours. Des personnages fantomatiques sont les âmes qui disparaissent de tous ceux qui sont morts comme eux. »
Pierre Garel
novembre 2006 – mars 2007
« Le thème de ce projet est le désir d’émigration, obsession des jeunes burkinabé.
Il implique la collaboration de 10 hommes et 10 femmes que j’ai photographiés.
Un seul est déjà parti, puis, écœuré, exténué, revenu avec la volonté de rester au pays.
Installé au Burkina Faso depuis 6 ans, je connais la plupart d’entre eux depuis longtemps.
Dans cette série, les hommes, divisés en deux, partent – mais s’écrasent contre un mur.
et les femmes attendent, avec une infinie patience, le retour de leur homme…
Mon travail de peintre étant axé, depuis 1993, sur le déplacement,
j’envisage enfin une série ambitieuse abordant directement la question de l’immigration : partir
à tout prix pour faire fortune dans les pays riches qui pillent l’Afrique.
Mais la mondialisation qui favorise le déplacement des capitaux interdit celui des hommes.
Le projet « Nos mécanisations mentales » (avec Pytha Nikiéma, 2004) était motivé par la
lucidité des écrits de Norbert Zongo, assassiné parce qu’il dérangeait les puissants.
Celui–ci l’est par les positions alter–mondialistes radicales de Aminata Traoré,
tout autant douloureusement lucides. »