FOCUS / « Organic Mood » de Hyacinthe Ouattara


Par Sophie Bernal – Collectif 1:61 les jeunes historiens de l’art

Des lianes de laine dans le white cube ? C’est possible à la D Galerie (Paris, 19). La galerie a présenté début février 2020 le travail de Hyacinthe Ouattara, artiste plasticien né en 1981 au Burkina Faso.
Située aux frontières entre installation artistique et happening, son œuvre interroge les possibilités créatrices du matériau textile. Fruit d’une résidence de quelques jours de l’artiste dans la galerie, une installation textile in-situ se déploie du sol au plafond de l’espace d’exposition. Le spectateur, invité à s’y frayer un chemin, peut se saisir des quelques objets posés aux pieds des fils qui composent l’œuvre. Pas de mot d’ordre face à ce désordre rythmé : l’installation est pensée comme un réseau de maillage organique sans début ni fin. Muée en œuvre charnelle et invasive, elle se fait le témoin des rencontres faites par l’artiste lors de ses voyages du Sénégal vers la France. Témoin, aussi, du dialogue noué entre la forme et l’informe, le monumental et l’infiniment délicat. Une deuxième partie de l’installation se compose de filets de pêches emprisonnés au-dessus des têtes des visiteurs et de sanctuaires miniatures faits de morceaux de tissus entremêlés. Si l’expérience des tissages métissés d’Ouattara vaut à elle-seule le détour, l’événement est aussi l’occasion de mettre en lumière un genre longtemps mésestimé dans le champ de l’histoire de l’art. Alors, rien que pour ça, n’allons pas voir cette exposition – car ça n’en est pas une – mais pénétrons dans l’œuvre toute entière.

Sophie Bernal
Historienne de L’art